Y-a-t-il de la place pour la sensibilité dans le monde du travail ?
J’ai eu plusieurs échanges à ce sujet récemment, et celui-ci me semble concerner un grand nombre de personnes et d’entreprises.
A première vue, sensibilité et monde du travail ne semblent pas très compatibles. Ne pas avoir réellement de liens. L’un(e ) peut même sembler exclure l’autre…
Monde du travail et expression des émotions ne vont pas de pair. Le travail n’est clairement pas le lieu pour des débordements, ni même pour des variations émotionnelles importantes. S’ils arrivent que nombreuses soient les personnes à tous niveaux dans l’entreprise qui sont à un moment ou un autre traversées par des émotions sur le lieu de travail, que celles-ci soient en lien avec des évènements personnels ou professionnels il est implicitement entendu que nous devons « contenir » nos émotions au travail, qu’il s’agisse de la joie, de la peur, de la colère, de la tristesse et de leur immense gamme de variations.
Or cela va être plus aisé pour certaines personnes que pour d’autres, en particulier pour les personnes dites sensibles ou hypersensibles.
On parle beaucoup des hypersensibles (cf les travaux d’Elaine Aron), et sans vouloir inscrire une partie de la population -que certains spécialistes estiment représenter entre 20 et 30% de la population générale- dans une « case », le fait d’être plus sensible que d’autres peut devenir une réelle difficulté pour trouver pleinement sa place dans le monde du travail.
Car par exemple ces personnes peuvent plus souvent que d’autres présenter les caractéristiques suivantes :
percevoir davantage de stimuli dans l’environnement et ne pas toujours savoir les prioriser
être très, voire trop, empathique
être plus souvent angoissé que ses collègues
pleurer plus souvent
avoir des réactions, même non visibles, vives et énergivores
se sentir découragé plus facilement
Etc.
Le nombre de mes clients qui m’ont dit se sentir « inadaptés » dans le monde professionnel en raison d’une sensibilité « exacerbée » ou « trop présente » est incroyablement élevé. Un sentiment de ne pas correspondre aux attentes, de ne pas entrer « dans le moule », jusqu’à celui de ne pas se sentir à sa place.
Lorsque l’on aborde la situation à l’inverse, en considérant la sensibilité comme un atout et un talent, s’enclenche alors une réflexion totalement différente : avec cette sensibilité, en la réhabilitant, qu’est-ce qui devient possible ?
Quel choix de métier ?
Quels environnements gagnent à bénéficier de cette sensibilité ?
Quels points forts cette sensibilité permet-elle dans le poste actuellement occupé ou dans le prochain?
Comme la personne sensible capte des signaux que d’autres ne perçoivent pas, elle peut proposer des solutions qui vont faciliter une décision et ainsi éviter des impairs, mieux sentir ce qui peut fédérer une équipe et générer de l’engagement, repérer des signaux faibles dans une situation de travail, penser à des détails que d’autres ignorent, inclure des paramètres que d’autres négligent dans la façon de mener une action, établir des liens entre différentes idées et faire preuve de créativité, démontrer de la subtilité...
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Alors, les (hyper)sensibles ont-ils leur place dans le monde professionnel ?
Il me semble y avoir au minimum 2 conditions pour que la sensibilité puisse être un véritable atout dans le monde professionnel :
1. Que la personne « hypersensible » apprenne à « contenir » ses émotions et à faire alliance avec ces dernières afin de ne pas être débordée ou être menée par celles-ci : cela s’apprend, même si ce n’est pas nécessairement aisé.
2. Que les environnements professionnels sachent accueillir ces profils : faire évoluer la culture de l’entreprise, apprendre à intégrer et valoriser ces apports différents.
Quelques pistes concrètes pour permettre à la sensibilité d’apporter une valeur ajoutée :
L’approche de la Communication Non Violente représente une approche exceptionnelle de conscience de soi, pour recréer ou apaiser un lien avec ses émotions et ce qui est vivant en soi. Ne serait-ce qu’apprendre à nommer ses émotions et ce qui les déclenche est déjà un facteur de changement majeur qui permet une prise de recul essentielle.
Les ateliers utilisant l’expression artistique que nous organisons avec un travail sur la voix, avec la peinture, l’argile, l’écriture, offrent également un très beau chemin pour explorer sa sensibilité et en quoi elle peut constituer un talent. Ces media différents et l’expérimentation d’un travail concret en groupe vont mettre au jour de nouvelles facettes.
C’est (notamment, mais pas seulement!) pour ces raisons que ces approches font très souvent partie de nos accompagnements sur mesure.
Faire alliance avec sa sensibilité, voire son hypersensibilité, et la faire vivre dans le monde du travail avec de réels bénéfices pour les personnes comme pour l’entreprise, apprendre à accueillir la sensibilité d’autrui, faire rimer ensemble rationalité et sensibilité…
Et si c’était une voie inspirante et attractive pour les collaborateurs dans l’entreprise du XXIeme siècle ?